Médecin au service de médecine interne et de maladies métaboliques à Allô Docteur-Abidjan, une association de médecins basée à Abidjan, Douala et Yaoundé, Docteur Nanko Tonda Josué nous donne, dans cette interview, de plus amples précisions sur le lupus. Le but étant ainsi d’instruire les un(e)s et les autres sur les caractéristiques, les particularités voire les spécificités pouvant être liées, d’une façon comme une autre, à cette maladie.
Docteur, que pouvez-vous déjà nous dire au sujet du lupus ?
Le lupus est une maladie chronique auto-immune peu fréquente dans la population générale et assez méconnue du grand public. C’est une maladie potentiellement grave, qui peut avoir plusieurs manifestations cliniques altérant significativement la qualité de vie des personnes atteintes et cette maladie peut entrainer le décès.
Quels sont donc les différents types de lupus auxquels ces personnes peuvent être confrontées de manière plus précise ?
On distingue généralement deux (2) grands types de lupus à savoir le lupus cutané et le lupus érythémateux systémique. Le lupus cutané est généralement limité à la peau tandis que le lupus érythémateux systémique peut toucher plusieurs organes simultanément comme les articulations, les reins, la peau, etc. Par ailleurs, on distingue aussi le lupus érythémateux néonatal (affectant le nouveau-né) et le lupus érythémateux induit par des médicaments.
Quels sont les symptômes pouvant être déjà liés à ces différents types de lupus ?
Les symptômes du lupus sont très variables en fonction des organes touchés, ce qui rend bien souvent difficile son diagnostic. On peut avoir des signes généraux comme une fièvre, une asthénie (fatigue), des manifestations articulaires (douleurs articulaires, gonflements, déformation des doigts), des manifestations cutanéo-muqueuses (éruption cutanée sur le visage, ulcération dans la bouche, le nez, une perte de cheveux), des manifestations digestives (nausées, douleurs abdominales), les manifestations rénales (œdèmes du visage, des jambes), des manifestations neuropsychiatriques (troubles de la personnalité, céphalées, convulsions), des manifestations cardio-pulmonaires (douleurs thoraciques).
Quels sont les facteurs de risque d’être effectivement confronté(e) à de tels symptômes ?
Le lupus est une maladie auto-immune (maladie au cours de laquelle le système immunitaire s’attaque à des organes ou des systèmes de l’organisme) dont la cause est encore mal connue. Il existe cependant des facteurs de risque : le sexe (les femmes sont plus beaucoup plus touchées par cette maladie que les hommes), la prise de certains médicaments, certaines infections, l’exposition au soleil (pour le lupus cutané).
Quelles sont les complications qui peuvent en résulter si rien n’est fait à temps pour contenir les symptômes ?
Le lupus peut avoir plusieurs complications, entre autres des fausses couches à répétition chez les femmes (le syndrome des antiphospholipides), une insuffisance rénale, une insuffisance cardiaque, un Accident Vasculaire Cérébral (AVC). Certaines complications peuvent aboutir au décès.
Que faut-il faire dès que la personne concernée remarque la persistance voire l’aggravation des symptômes pouvant être liés au lupus ?
Le diagnostic du lupus est difficile parce que la présentation clinique est diverse. Les symptômes peuvent mimer ceux de plusieurs maladies courantes, et donc les personnes qui en souffrent ne voient pas toujours, à première vue, la nécessité de consulter. Il est donc important d’être vigilant(e) et rapidement consulter un médecin en cas d’apparition et de persistance de certains signes, plus précisément ceux que nous avons précédemment évoqués (signes cutanés, articulaires, etc.)
A votre niveau, quelle démarche vous permet ainsi de confirmer que cette personne est effectivement confrontée au lupus ?
Le diagnostic du lupus est clinique et paraclinique. Sur le plan clinique, nous recueillons l’histoire de la maladie, les différents symptômes présentés, les traitements reçus, etc. Ensuite, nous examinons le/la patient(e) à la recherche des signes physiques en rapport avec la maladie lupique. Des examens paracliniques sont aussi réalisés en fonction des différents éléments retrouvés à l’examen clinique.
Qu’en est-il de la prise en charge, du traitement et du suivi de cette personne ?
Le lupus est une maladie chronique, le traitement sera donc à long terme. Il associe des moyens non médicamenteux et médicamenteux. Pour ce qui concerne les moyens non médicamenteux, il est recommandé de soigner son style de vie, éviter les facteurs aggravants ou déclenchants (exposition au soleil pour certaines atteintes cutanées par exemple). Concernant le traitement médicamenteux, on peut avoir recours à des médicaments tels que les corticoïdes, certains antipaludiques, les anti-inflammatoires et les immunosuppresseurs. Des mesures spécifiques peuvent être prises en fonction de certaines atteintes (cutanées, rénales, etc.)
Quelles attitudes doit adopter l’entourage de cette personne dans pareille situation ?
Nous recommandons à tout le monde de s’éduquer au sujet du lupus car cette maladie reste largement méconnue et parfois elle est mystifiée dans certaines sociétés africaines. Aussi, le lupus étant une maladie chronique, la personne atteinte doit bénéficier de soutien (sur les plans psychologique, moral, financier, etc.). L’entourage devrait donc veiller à apporter ce soutien multiforme afin d’améliorer significativement la qualité de vie de la personne atteinte. Par ailleurs, nous invitons tout le monde à plus de vigilance en faisant attention aux signes du lupus que nous avons évoqués, et surtout consulter rapidement un médecin car un diagnostic précoce est associé à un meilleur suivi et à une prévention optimale des complications.
Interview réalisée par Cédric KOIVOGUI avec Olivia DECAMILLE