Après avoir obtenu, en 2018, un Bachelor of science (Bsc) spécialité épidémiologie et santé publique à l’Université de Dschang au Cameroun, Docteur Nanko Tonda Josué a également obtenu, en 2022, un Doctorat en médecine générale à l’Université des Montagnes de Bangangté au Cameroun. Actuellement, il exerce en qualité de Médecin au service de médecine interne et de maladies métaboliques au sein de ‘’Allo Docteur’’, une association de médecins basée à Abidjan, Douala et Yaoundé. Dans cette interview, il nous livre bon nombre d’informations sur la notion de glycémie et il nous donne des conseils en vue de la réguler tout en y faisant plus attention.
Docteur, très souvent, on entend parler de variation de glycémie. Pouvez-vous nous expliquer ce qu’il faut entendre par ce terme ?
Avant de parler de variation de la glycémie, il faut tout d’abord comprendre la notion de glycémie. La glycémie, c’est tout simplement, la quantité de sucre (de glucose) contenue dans le sang. Généralement, on exprime cette quantité de glucose dans le sang en gramme/litre (g/L) ou en gramme/décilitre (g/dL) de sang. Cette quantité de glucose contenue dans le sang peut varier en fonction des périodes de jeûne ou encore à la suite des repas, de l’activité physique, de certains médicaments ou même du stress. Voici d’emblée, ce qu’il faut déjà comprendre, lorsqu’on parle de variation de la glycémie. La variation de la glycémie est donc la faculté, pour cette glycémie, d’être élevée ou basse. Comme susmentionné, divers facteurs peuvent en être la cause ou l’influencer.
Quelle(s) nuance(s) existe(nt) donc entre » faire un pic de glycémie » et « faire une hyperglycémie » ?
Communément, un ‘’pic de glycémie’’ c’est lorsque la glycémie s’élève excessivement et rapidement au-delà de sa valeur normale. Ce phénomène peut s’observer chez des personnes atteintes de diabète à la suite du non-respect du traitement, d’une infection, ou encore chez des personnes saines après un repas copieux et très riche en glucides (sucres). L’hyperglycémie, c’est lorsque la glycémie va au-delà de sa valeur normale. A ce niveau, nous devons rappeler que la valeur optimale de la glycémie, prise à jeun, est comprise entre 0,70 et 1,10 g/l de sang. Entre 1,10 et 1,25g/l, on parle de prédiabète. Une glycémie à jeun supérieure ou égale à 1,26g/l doit faire évoquer un diabète. En somme, concernant le « pic de glycémie », c’est un terme populaire qui veut tout simplement dire que la glycémie s’est élevée rapidement au-delà de sa valeur normale et souvent de manière transitoire. Il s’agit donc d’une hyperglycémie. Lorsqu’elle est chronique, l’hyperglycémie fait directement référence au diabète.
Il semblerait que certaines personnes, en souffrant, manifestent, au niveau de leurs attitudes, des réactions d’impulsivité. Pouvez-vous nous éclairer sur ce point ?
Il peut y avoir un lien entre une élévation de la glycémie et un changement du caractère ou de l’humeur chez la personne qui en souffre. Ce lien peut être direct, surtout lorsque cette hyperglycémie est chronique. En effet, l’élévation de la quantité de glucose dans le sang en elle-même peut perturber le fonctionnement des neurones : ce sont les cellules du cerveau. Cette perturbation peut s’accompagner des troubles du comportement et/ou de l’humeur. Ce phénomène est fréquemment observé chez les diabétiques.
En ce qui concerne la hausse de la glycémie, à partir de quel niveau une personne en souffrant peut être considérée comme, formellement, diabétique ?
Pour déclarer un patient diabétique, on mesure la valeur de sa glycémie. Il y a deux (2) cas de figure : dans le premier cas de figure, la glycémie doit être prise à jeun (généralement 8h après un repas). Si on obtient chez un patient, à deux reprises, une glycémie supérieure ou égale à 1,26g/L, ce patient est considéré comme diabétique. Pour le second cas de figure, si on retrouve chez un patient des signes cardinaux du diabète abrégés sous le sigle PPPA (Polyphagie, Polyurie, Polydipsie et Amaigrissement) c’est-à-dire on constate chez ce patient, un amaigrissement en plus d’une envie manifeste de beaucoup manger, boire et uriner, et s’il présente, en plus, une glycémie aléatoire (glycémie prise même en dehors du jeun) supérieure ou égale à 2g/L, il est aussi considéré comme diabétique.
A ce niveau, comment s’effectue la prise en charge du patient ?
De manière générale, la prise en charge varie selon le type de diabète. Pour le diabète de type 1, le patient a un déficit en insuline. La prise en charge sera donc basée sur l’administration d’insuline (insulinothérapie). Pour le diabète de type 2, la prise en charge sera basée sur trois axes majeurs à savoir l’alimentation, l’activité physique et les médicaments. Un accent particulier sera surtout mis sur les deux premiers. Il faut signifier que le diabète de type 1 peut aussi faire intervenir l’alimentation et l’activité physique régulière. Ce qu’il faut retenir, c’est que la prise en charge du diabétique de type 1 nécessite surtout de l’insuline, tandis que celle du diabétique de type 2 nécessite des mesures hygiéno-diététiques souvent associées aux médicaments.
Au delà du suivi qui va être effectué par le médecin, quel rôle la famille ou l’entourage du patient doit-il jouer dans la prise en charge du diabétique ?
Le diabète étant une maladie chronique, sa prise en charge se fait donc sur le long terme. Ce genre de situation peut générer chez le patient des problèmes d’ordre psychologique, social, financier, etc. Au niveau familial, un accompagnement doit être fait de sorte à ce que le patient se sente entouré à chaque étape du suivi de sa maladie au niveau de ses examens, de ses médicaments, son alimentation ou même encore de l’activité physique. A titre d’exemple, un diabétique de type 2 doit absolument être soutenu par ses proches lorsqu’il s’agit, pour lui, de s’adonner à une activité physique régulière. Ses proches doivent pouvoir l’inciter à le faire surtout lorsqu’il n’en manifeste pas toujours le besoin, ou encore lorsqu’il se sent découragé. Ils peuvent ainsi l’accompagner collectivement à ses séances de sport en vue de marquer davantage leur soutien. Ce genre de soutien est capital car il permet un meilleur suivi de la maladie. Accompagner le diabétique psychologiquement et moralement par des paroles encourageantes, motivantes ; socialement en l’intégrant aux activités de la vie quotidienne de la société, et même financièrement dans la réalisation de son suivi médical.
Pour finir, quels conseils pouvons-nous donner à une personne présumée (pré) diabétique pour qu’elle revienne à une glycémie normale ?
Pour réguler sa glycémie ou même s’en prémunir, une personne (pré)diabétique, doit se conformer à un certain nombre de règles. Premièrement, cette personne doit faire attention à son alimentation. Elle doit être rigoureuse en ce qui concerne son régime alimentaire car il y a certains aliments avec un fort indice calorique qui favorisent la survenue de l’obésité. Ce sont notamment les aliments riches en lipides (graisses, huiles) ou en glucides (sucres) qui doivent être revus conformément aux recommandations du médecin. Deuxièmement, faire une activité physique régulière au moins trois fois par semaine de manière intensive, en raison de 45 min environ par séance. Troisièmement, lutter surtout contre les autres facteurs de risque du diabète à savoir la sédentarité, l’obésité, le tabagisme, etc. Limiter également la consommation d’alcool. A défaut, décider de ne plus en prendre. En tout, opter pour un mode de vie sain.
Interview réalisée par Cédric KOIVOGUI avec Josiane BADET